Le Grand Est a géré la vague
Chers confrères, chers amis
Nous vous écrivons des frontières de l’Est, où nous avons avec l’ensemble de notre corps, devancé l’appel à la mobilisation. Dans le contexte hospitalier déjà tendu que vous connaissez, l’épidémie du COVID 19 est venue frapper à nos portes en s’en prenant d’abord à la région de Mulhouse lourdement touchée. Ce léger décalage d’une semaine, nous a permis de mettre nos moyens en ordre de marche, et de décréter une mobilisation générale de la psychiatrie pour faire face aux côtés de nos collègues. Notre première urgence a été de nous organiser, de rationaliser l’usage de nos forces et de nos moyens, en créant des dispositifs adaptés en direction de ceux qui en avaient le plus vite, et le plus besoin.
En premier lieu les patients malades, leur famille, mais aussi rapidement les proches des personnes décédées. Ceci en organisant le fonctionnement de la psychiatrie de liaison et des urgences en mode COVID. Très rapidement des signaux nous ont été envoyés par les soignants en réanimation, mais aussi et surtout par les autres collègues et confrères des services transformés en unités COVID, ou redéployés dans les réanimations.
Pour cela Pierre Vidailhet 1 a réparti les missions. Il nous a donné une feuille de route précise, et une latitude d’action pour nous adapter rapidement aux besoins qui évoluaient très vite.
Amaury 2 , et Julie 3 , ont été chargés de créer le dispositif CoviPsyHUS en direction des soignants de notre hôpital.
Pour ma part, avec Morgane 4, nous avons été chargés d’élargir, dans le cadre de CoviPsy67 le dispositif à l’ensemble des soignants de notre département, car des signaux d’alarme venaient également des autres hôpitaux, des EPSM, mais aussi des EHPAD et maisons de retraite, et des foyers d’accueil.
Le dispositif propose des réponses graduées, commençant par la mise à disposition d’un numéro de téléphone unique, la possibilité d’entrer en contact avec des psychologues et des psychiatres formés, capables d’assurer des entretiens et des téléconsultations très rapidement, et le cas échéant des consultations présentielles. Pour coordonner les moyens psychiatriques à destination de chaque population particulièrement fragile (personnes âgées, personnes précaires, adolescents, périnatalité, violences intrafamiliales) nous avons désigné avec nos partenaires du territoire un seul professionnel référent. Si nécessaire nous pouvons aussi nous appuyer sur la CUMP67 qui peut déclencher et envoyer sur place ses moyens, comme nous le faisons depuis le début en direction des équipes hospitalières sous la forme d’unités mobiles proactives, qui viennent à la rencontre de toutes les équipes. C’est l’occasion de travailler avec nos collègues de ville qui ont rejoint nos rangs : 26 Psychiatres et 30 Psychologues !
Mais dans le contexte d’épidémie du confinement, les répercussions psychologiques sur la population générale sont loin d’être nulles. Pour elle, nous avons créé, nous appuyant sur notre Centre Régional du Psychotraumatisme Grand-est, et en partenariat avec le conseil local de santé mentale de notre territoire, le dispositif téléphonique Coviécoute67, armé d’une centaine de volontaires issus des Collectivités territoriales, de psychologues, mais aussi de médecins, de psychiatres qui travaillent toute la journée et qui sont en mesure d’écouter, de conseiller, de réorienter les personnes en difficulté sur les ressources disponibles sur notre territoire.
Comme vous le voyez, la tâche est immense, mais le cœur et l’enthousiasme collectif ne le sont pas moins !
Dans l’attente de vous lire en retour,
Bien chaleureusement.
1 Pr P. Vidailhet, Psychiatre, PU-PH, Responsable de la Psychiatrie d’Urgences, de Liaison et du Psycho trauma aux Hôpitaux Universitaires de
Strasbourg
2 Dr A. Mengin, Psychiatre, Praticien hospitalier, Responsable…
3 Dr J. Rolling, Pédopsychiatre, Praticien hospitalier, Responsable…
4 Dr M. Fath, Pédopsychiatre, Assistante Spécialiste
Dominique Mastelli et Pierre Vidailhet